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Pape Diouf, déjà deux ans

Sur la photo, de gauche à droite, Joseph-Antoine Bell, capitaine de l’OM, Me Serge Pautot, avocat et Pape Diouf

Par Me Serge Pautot, avocat au barreau de Marseille, compagnon « historique » de Pape Diouf

Deux années déjà que notre ami Pape Diouf nous a quitté, décès intervenu quelques jours celui de Manu Dibango, le célèbre musicien. L’Afrique était en deuil mais l’Europe également, tout comme le football et la musique.

Agé de 68 ans, la disparition de Pape Diouf, l’ancien Président de l’Olympique de Marseille a été prématurée. Il avait encore beaucoup de projets à réaliser.  Nous étions ensemble  à la mi-février 2020 à notre cabinet pour des souhaits d’enseignement du droit du sport à Dakar.

Ma première rencontre avec Pape Diouf

Tout me prédestinait à rencontrer Pape Diouf : service militaire à Dakar, puis coopérant à  Alger, diplômé de droit africain de l’Université de Paris et journaliste quelques mois à Africascope, magazine où j’avais bien connu Manu Dibango, le musicien camerounais, victime lui aussi du coronavirus.   Vous l’aurez compris, une grande passion pour l’Afrique. Nous nous rencontrons en 1987  dans une salle de boxe où il venait faire avec un confrère un reportage pour le journal  La Marseillaise. Véritable coup de foudre  réciproque sur les thèmes de l’Afrique et des Africains. Quelques jours après, avec la promesse de se retrouver,  il me téléphone pour rencontrer un ami africain.  Surprise ! Me voilà face à Joseph-Antoine Bell capitaine de l’Olympique de Marseille : « Maître, nous sommes des Africains naturalisés français.  Les autorités du football nous  considèrent comme des « vrais-faux français ». Pourtant, nous ne sommes pas devenus français par un coup de baguette magique mais parce que ça arrange les clubs confrontés à l’application des quotas de joueurs étrangers, c’est inacceptable… ». Nous décidons  aussitôt de monter à Paris pour une conférence de presse musclée en avril 1989 pour combattre ces règlements discriminatoires. Notre revendication aboutira à l’abandon du projet.

Le ciment avait pris pour devenir inséparables

Le ciment avait pris pour devenir inséparables et  envisager la prise en main du destin des footballeurs venus d’Afrique,  managés par des agents français.  Joseph-Antoine Bell martelait : «  il faut que nous soyons capables de gérer nos carrières entre nous, entre africains ». Pape laissait passer ses sentiments, très nationalistes, tout à fait légitimes qui correspondaient au  slogan mille fois répétés «  l’Afrique aux Africains ». Pape Diouf par sa taille,  son parler,  présentait  une autorité naturelle voir imposante dans ses propos revendicatifs. Mais, journaliste sportif, que pouvait-il faire ? Il n’avait pas la qualité d’agent. Qu’à cela ne tienne, nous allons le préparer à l’examen et tous les dimanches soirs à mon cabinet, il révisait  son droit avec mon fils Michel.  Une fois l’examen en poche,  Michel dépose aussitôt,  en juillet 1988,  les statuts de Mondial Promotion avec l’objet d’ «  ouvrir,  offrir un plan de carrière ainsi que des facilités pour les demandes de jeunes sportifs africains et la gestion de leur carrière ».  Le feu  était  allumé,  il ne demandait  plus qu’à s’embraser.

Pape Diouf, agent

Pape devenait le premier agent africain et rapidement de jeunes joueurs les frères Boli, François Omam-Biyik, Henri Camara et bien d’autres se mettaient  sous son aile. Pape était content,  l’Afrique comptait  un des siens pour défendre ses joueurs,  promouvoir leur carrière.  Il me restait le contentieux, pour la défense des plus grandes stars du football, Joseph-Antoine Bell,  Marcel Desailly , Abédi Pelé…La diaspora africaine gonflait les rangs de sa clientèle à laquelle s’ajoutent aussi d’autres joueurs, tels  Grégory Coupet, Bernard Lama, Xavier Gravelaine…

Mais  il restait un autre combat,  celui des quotas,  mesure discriminatoire s’il en était. Mais Pape  Diouf,  arrivé « bien en cours »,  soucieux de placer au mieux ses poulains dans les clubs,  ne voulait pas trop aller à la bagarre avec les présidents de clubs. Ce  combat,  mon fils Michel  le mena avec la basketteuse Lilia Malaja dont le résultat fut d’après les paroles du Président de la FIFA, « l’arrêt Malaja, un arrêt Bosman à la puissance dix ». Ce qui ravit  d’espoir Pape, voyant là de nouvelles opportunités pour « placer » ses joueurs dans les clubs européens.

La promotion et la défense des footballeurs africains

Au printemps de l’année 2004,  Pape nous  annonce son arrivée à l’OM en qualité de directeur sportif puis  il deviendra président du club. Nos liens se sont distendus après 25 années d’une riche et fructueuse collaboration. Après son départ de l’OM en juin 2009, nous nous  retrouvons régulièrement avec de nouveaux projets. La mort l’a frappé avant leur réalisation.  Il nous restera l’image d’un homme, parfois intransigeant,  avant tout soucieux des hommes de son continent. Africain self-made-man,  arrivé au sommet du football français à partir de l’idée des sportifs africains aux Africains. Victime de son propre succès, Pape aimait  dire « je suis le seul président noir d’un club en Europe ».

Pari gagné pour celui qui deviendra aussi expert sur les paris sportifs pour le football pour l’Officiel des paris en ligne au PMU.  Pour ceux,  nombreux qui ont connu Pape, il laisse le souvenir d’un homme remarquable,  un professionnel rigoureux, ouvert aux autres et fidèle à lui-même pour la promotion et la défense des joueurs africains. 

Adieu Pape,  on t’aimait bien et merci pour tout ce que tu nous as apporté.

Hommage de Maître Serge Pautot,  Avocat à Marseille, Compagnon « historique » de Pape Diouf. 

Mail : legisport@wanadoo.fr

Pape Diouf avec Me Michel Pautot, rédacteur en chef de LEGISPORT lors d’un entretien