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« Le Traité de Paris, un grand moment de l’histoire européenne », nous indique Madame Monique Beltrame, Comité Européen

MADAME MONIQUE BELTRAME, PRESIDENTE DU COMITE EUROPEEN : « IL Y A 70 ANS, UN ACTE DE FOI POUR BÂTIR L’AVENIR AVEC LE TRAITE DE PARIS »

« Il y a 70 ans, le 18 avril 1951, le Traité de Paris mettait en œuvre les principes, définis par le plan Jean Monnet et proclamés, moins d’un an auparavant, dans la Déclaration Robert Schuman du 9 mai 1950.

Ce Traité discret institue la première Communauté européenne celle du Charbon et de l’Acier (CECA) et inaugure 70 ans de paix entre les six pays signataires, la Belgique, la France, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas et la République fédérale d’Allemagne puis instaure la paix sur tout le continent. L’Allemagne vient juste de retrouver une existence politique par la création de la République fédérale d’Allemagne (RFA), le 21 septembre 1949, accord établi par   les « Trois Puissances » occidentales, États-Unis, France et Royaume Uni tandis que  la loi Fondamentale de la RFA a été promulguée le 23 mai 1949, sous la conduite des occupants alliés, soucieux  de rendre impossible toute dérive totalitaire. Quel est le principe à l’origine de ce Traité qui permet de faire d’un continent en ruine, un exemple de coexistence pacifique entre les peuples ? Est-il encore d’actualité en Europe ?

Me Michel PAUTOT (LEGISPORT) et Madame Monique BELTRAME, Présidente du Comité Européen, auteure de la tribune sur le Traité de Paris

Le Traité de Paris est l’évènement historique dont l’impulsion a changé le cours de l’histoire pour sortir les pays européens de la spirale infernale de la guerre ; Il s’agissait de trouver le moyen d’unir dans un même effort les pays démocratiques de la pointe ouest eurasiatique restée encore libre.’’ Lecharbon et l’acier étaient à la fois la clef de la puissance économique et celle de l’arsenal où se forgeaient les armes de la guerres …les fusionner, par-dessus les frontières serait leur ôter leur prestige maléfique en les tournant, au contraire, en gage de paix’’, explique Jean Monnet dans ses Mémoires ‘’.Pour inverser le courant de l’histoire, le Gouvernement français propose de mettre en commun un pan essentiel de l’industrie lourde, le charbon et l’acier en plaçant sous une Haute Autorité commune. Le partage de la souveraineté avec l’ennemi d’hier sur un plan d’égalité est un véritable acte de foi en l’humanité pour dépasser le drame cataclysmique de la guerre.

Mais transposer ce principe généreux dans la réalité réclame un changement majeur dans l’esprit des hommes : faire passer l’intérêt commun avant l’intérêt national ! Jean Monnet aura la charge de transposer cette pensée dans la réalité. Dans la mise en œuvre de la CECA, il déploya tous ses efforts pour faire comprendre aux industriels et aux responsables politiques qu’il s’agissait « d’accomplir une œuvre commune non pour négocier des avantages mais pour rechercher son avantage dans l’avantage commun. »

Gérer ensemble les richesses pour créer la paix réclamait un cadre institutionnel particulier, basé sur un principe fondateur qui allait gouverner cette nouvelle Communauté européenne et l’Europe jusqu’à l’heure actuelle : le partage de la souveraineté librement consentiepar des nations respectueuses de l’État de Droit.

La CECA est gérée par une Haute Autorité, définie comme organe suprême, indépendante des gouvernements pour déterminer un plan d’action dans l’intérêt général, en soumettant ses projets à une Assemblée commune parlementaire composée de représentants de la société civile et un Conseil des ministres représentant les États.  Pour assurer le respect du principe d’égalité, une Cour arbitrale veille sur le fonctionnement de la première Communauté. Ce schéma perdurera au- delà des différents Traités.   La Haute Autorité commune devient la Commission Européenne qui impulse la politique européenne dans l’intérêt général, le Conseil représente les États, le Parlement les citoyens, la Cour arbitrale devient la Cour européenne de Justice.

Pour les Pères fondateurs, la CECA était la première étape vers une fédération européenne.  Économique par nécessité, le plan Monnet- Schuman était éminemment politique.

Cette conception de l’Europe est plus que jamais d’actualité.

En moins d’un an on avait jeté les bases de l’Europe, en moins d’un an on risque de les ébranler.

La mise en place du Plan de relance de 750 millions d’Euros en est la preuve.  Adopté le 21 juillet 2020 et en cours de ratification par les Parlements nationaux, il est brusquement suspendu par la Cour Constitutionnelle de Karlsruhe le 26 mars 2021 à la suite d’un référé de l’extrême droite, remettant en cause la primauté du droit européen sur le droit national. L’Allemagne ne serait plus souveraine dans la maîtrise des dépenses de la nation en cas de défaut de paiement de l’un des 27. Le prétexte est fallacieux car le grand emprunt européen, garanti par les Vingt-Sept, remboursable sur 37 ans, sera financé par de nouvelles ressources fiscales européennes (taxe carbone aux frontières, taxes plastique, numérique, sur les GAFAS…) qui seront votées prochainement, avant le début du remboursement à partir de 2028.

Pourtant c’est par l’Europe et la première Communauté du Charbon et de l’Acier que l’Allemagne a réintégré le concert des nations, recouvré sa dignité et avec elle la myriade de petits pays qui forment l’Union ».

Réaction de MAXENCE DAGHER, économiste : « la zone euro risque de se diviser en deux zones euros ». « Je partage vos inquiétudes…  Le plan de relance de 750 milliards d’€ n’est toujours pas entériné par l’Allemagne, les Pays-Bas, la Hongrie et la Pologne. Ceci sous prétexte de la nouvelle suspension de la Cour Constitutionnelle de Karlsruhe saisie par 16 hommes d’affaires allemands s’opposant au Quantitative Easing (QE) de la BCE de Mme Lagarde….Début 2023,  le Pacte de Stabilité et de Croissance doit être rétabli afin que la convergence des économies européennes se remette en place.La Zone € est en grand danger car l’Union n’est pas encore aboutie tant que l’Etat fédéral européen n’est pas en place.Si les plans de relance nationaux prennent le relai du budget fédéral européen, nos impôts le financeront. C’est une double peine qui se grève sur les taux d’intérêts bas. La zone euro risque de se diviser en deux zones euros en 2022-2023.L’application de ce scénario est cauchemardesque !Les coûts qui en résulteraient seraient exorbitants et il vaut mieux continuer l’aventure ensemble et garder l’euro tel quel.On en revient au même point : l’Union est sous ajustement  réel. Si les économies ne convergent pas rapidement afin de s’ajuster à l’euro, il se crée mécaniquement des excédents à la balance des paiements allemandes et donc des déficits à celles des autres pays européens. Berlin offre aux pays sud de l’Union un ajustement ordonné très douloureux qui se doit d’être rapide. Or l’euro fort ne convient pas aux économies du sud qui ont traîné dans l’application des critères de convergence préférant de fait un ajustement lent et donc moins pénible. La situation de l’économie mondiale n’a pas permis cela ».